En France, maltraitance, injustice et stigmatisation envers les personnes issues de l’immigration ne cesse de croître, dénoncent les associations qui leur viennent en aide. Mais tandis que les plus vulnérables subissent une double peine, certaines personnalités étrangères continuent d’être accueillies à bras ouverts malgré leurs activités subversives ou criminelles.
Dans un éditorial publié par Le Figaro, le journaliste Vincent Trémolet de Villiers invoque la recrudescence des attentats islamistes commis par des étrangers dans des lieux symboliques, de Charlie Hebdo à la basilique de Nice en passant par la décapitation de Samuel Paty dans un collège, pour dénoncer « le reniement de la conscience » de l’administration française en matière d’immigration. « Depuis des décennies, nos cours suprêmes renforcent les droits fondamentaux des étrangers : facilité pour les visas, largesse du droit d’asile, nombre d’expulsions dérisoire, naturalisations complaisantes. L’immigration, forte d’un pouvoir moral quasi religieux, bénéficie d’une incroyable immunité juridique », opine-t-il. Le rédacteur en chef adjoint du quotidien met le doigt sur un sujet qu’il convient d’analyser : la complaisance de l’État, parfois pour des raisons politiques ou diplomatiques, à l’égard de personnalités étrangères pour le moins louches, voire pour certaines condamnées suite à divers délits et crimes.
Incohérences de la politique migratoire française
En mai 2017, la France a ainsi accéléré la procédure pour délivrer le statut de réfugié politique à Piotr Pavlenski, opposant auto-proclamé du président russe Vladimir Poutine. Moins de cinq mois plus tard, en octobre 2017, il était arrêté avec sa compagne de l’époque, Oksana Shalygina, pour avoir incendié l’agence emblématique de la Banque de France située place de la Bastille à Paris. Après une courte peine de prison, il a de nouveau été interpelé pour avoir agressé deux personnes au couteau lors de la soirée du réveillon 2019. Mais l’artiste sulfureux s’est surtout illustré en diffusant des vidéos intimes du candidat LREM à la mairie de Paris, Benjamin Griveaux, provoquant son retrait de la course électorale. Dans son livre intitulé « Sous emprise » paru en début d’année, Oksana Shalygina révèle également la violence physique et morale qu’elle a subie lors de sa longue relation avec l’anarchiste russe.
Autre personnage encombrant à qui la France a déroulé le tapis rouge, Moukhtar Abliazov bénéficie lui aussi de la protection diplomatique française malgré un lourd passif judiciaire. Condamné par les juges anglais au civil à verser 4 milliards de dédommagement à une banque, et aussi à 22 mois de prison pour « outrage au tribunal », l’ancien ministre et homme d’affaires a voulu échapper à la justice britannique et a trouvé asile dans une luxueuse villa sur la Côte d’Azur, où les policiers français l’ont arrêté une première fois en 2013 suite à une énième demande d’extradition. Recherché par plusieurs pays européens ainsi qu’Interpol, il reste protégé par la France et a même obtenu le statut de réfugié politique le 29 septembre 2020, soit quelques jours seulement avant sa mise en examen par un juge français le 7 octobre 2020. Prétextant, comme Piotr Pavlenski, être persécuté dans son pays d’origine, Moukhtar Abliazov profite depuis huit ans des incohérences de la politique migratoire française, qui, à l’inverse, faillit à sa mission de protection des demandeurs d’asile les plus vulnérables.
Demandeurs d’asile vulnérables et parfois en danger
« Acteurs associatifs et institutionnels conviennent généralement que l’éloignement des personnes déboutées du droit d’asile, devenu la variable d’ajustement de la migration, pose un véritable problème, souligne Pierre Henry, président de l’association France Fraternité, dans une tribune publiée par Le Monde. Chacun s’en accommode pourtant depuis des dizaines d’années, comme le chaos indigne de l’accueil, qui semble depuis cinq ans parfaitement intégré aux politiques publiques. »
Vendredi 26 avril 2021, l’attaque meurtrière du commissariat de Rambouillet par un Tunisien de 36 ans arrivé clandestinement en France en 2009 n’a pas manqué de faire remonter à la surface de nombreux liens entre immigration et terrorisme, ou encore islam et radicalisation. La régularisation, après 10 années passées sur le sol français, de l’assassin de la policière de 49 ans, n’a ainsi pas empêché les amalgames de fleurir chez une partie des hommes et femmes politiques. À l’image de Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France, qui appelle à « cesser de nier » le lien entre immigration clandestine et terrorisme et veut rétablir le caractère délictueux des situations irrégulières sur le territoire national.
Attention à ne pas tomber dans les raccourcis faciles : « Qu’il y ait des actes comme le drame de Rambouillet, bien sûr que c’est absolument condamnable et inacceptable, mais ce qui l’est tout autant, c’est de généraliser ces crimes et en faire porter la responsabilité à l’ensemble de l’immigration contre toute vérification », regrette Geneviève Jacques, ancienne présidente de la Cimade. L’ex-responsable de cette association de défense des migrants déplore également « une certaine banalisation de ce discours dans la période actuelle qui […] préoccupe beaucoup tous les défenseurs de la démocratie et des droits des plus vulnérables ».