Le recours à l’intelligence artificielle pour surveiller et contrôler les émotions des employés en temps réel représente une nouvelle facette de la surveillance au travail, suscitant des préoccupations en matière éthiques et impactant la performance des travailleurs.
L’intelligence artificielle des émotions : une pratique en plein essor
Le concept d’intelligence artificielle des émotions (EAI) n’est pas nouveau, mais son application dans le monde du travail est en hausse. L’EAI, utilisée dans le cadre du recrutement et du suivi des performances des employés, peut fournir en temps réel des suggestions sur le ton ou l’attitude à adopter, une situation que les travailleurs trouvent souvent déconcertante. De plus, la crainte que l’EAI ne livre des commentaires négatifs sans compenser par des remarques positives crée une angoisse supplémentaire chez les employés.
Une surveillance intrusive
À titre d’exemple, certaines grandes entreprises ont intégré des biocapteurs à leur mobilier de bureau pour mesurer le rythme cardiaque, la variabilité du rythme cardiaque, le rythme respiratoire et la nervosité des salariés. Bien que ces mesures soient présentées comme étant anonymes et destinées à améliorer le bien-être en entreprise, certains experts doutent de l’authenticité de cette démarche. Pour Sarah Myers West, directrice générale de l’AI Now Institute, « Si vous travaillez avec la biométrie et la reconnaissance des émotions, vous avez affaire à des données identifiables par nature. Il y a tellement de flux de données qui sont collectés que l’argument de l’anonymisation ne tient pas. »
Une efficacité contestée
L’efficacité de l’EAI, basée sur des travaux affirmant que les émotions humaines sont révélées par des expressions faciales universelles, a été remise en question par plusieurs études. Ces recherches ont réfuté ces affirmations, suggérant ainsi que l’EAI pourrait ne pas être aussi fiable que prévu.
Des conséquences délétères
En outre, l’effet de la surveillance sur la performance au travail est loin d’être positif. Selon une étude menée par David Welsh de l’Université d’État de l’Arizona, la surveillance au travail peut inciter les employés à enfreindre les règles. En effet, une surveillance accrue a été associée à des pauses non autorisées, une réduction volontaire du rythme de travail, ou même un vol plus fréquent.
Une mauvaise idée ?
Il apparaît donc que l’utilisation de l’intelligence artificielle pour surveiller les salariés, bien qu’innovante, pourrait mener à des conséquences indésirables, allant de la baisse de la morale des employés à une diminution potentielle de la productivité. Alors, face à ces faits, devons-nous réévaluer la pertinence de cette technologie dans le monde du travail ?